Questionner n’est pas qu’un geste technique!

En gestion des ressources humaines, il est habituel de parler de techniques d’entrevue, de stratégies de coaching, d’entretiens d’évaluation, de diagnostics, etc. La pertinence de tous ces outils n’est plus à prouver afin de se doter d’une méthode de travail efficace et rigoureuse. Or, tous ces outils ont un dénominateur commun : le questionnement!

Combinée à l’écoute, savoir questionner est une compétence qui se trouve au cœur de la profession RH et des métiers reliés aux sciences de la gestion. En effet, la « question » est l’un des outils les plus puissants dont vous disposez pour exercer votre influence, développer votre leadership, résoudre les conflits, développer le potentiel et, bien entendu, sélectionner judicieusement les meilleurs talents. Malheureusement, dès son tout jeune âge, l’individu est habilité à répondre aux questions et non pas à les poser.

Peu importe la forme qu’on lui donne, la question est avant tout un acte de découverte, puisqu’elle sert à obtenir une information, à mieux comprendre, à générer des apprentissages, à susciter une réflexion, à entrevoir des solutions, etc. Or, la qualité des réponses obtenues dépend de la qualité des questions que l’on pose.

Qu’est-ce qu’une bonne question?

  • La question doit être ouverte pour recueillir un maximum d’information ou avoir un maximum d’impact. Elle devrait commencer par : qu’est-ce, quel, dans quelle mesure, qui, comment, pourquoi, de quelle façon, parle-moi de, etc. De telles formulations permettent à l’interlocuteur de se mettre en situation de recherche et de produire des réponses qui ouvrent sur de nouvelles pistes de questionnement ou de réflexion.
  • La réponse doit être claire. Si on a doit reformuler fréquemment ses questions parce qu’elles génèrent de l’incompréhension chez l’interlocuteur, c’est qu’il faudrait sans doute revoir sa méthode de questionnement. Il faudrait d’abord clarifier mentalement l’objectif et l’énoncé de sa question avant de la formuler.
  • La question doit être concise. La réponse doit être au moins quatre fois plus longue que la question. Si la question dépasse le temps d’une respiration… c’est trop!
  • La question doit être pertinente, c’est-à-dire cohérente avec le déroulement de l’entretien et le sujet discuté.
  • La question doit être unique : un seul sujet par question et un seul point d’interrogation par question, sans quoi on risque de créer de la confusion chez son interlocuteur ou d’oublier soi-même ce qu’on voulait apprendre au départ!
  • La question doit être neutre et objective afin de ne pas invalider la réponse en mettant des mots dans la bouche de la personne interrogée.

Transformer une bonne question en une question efficace Il est relativement facile de formuler d’avance la première question à poser : ouverte, pertinente, ni trop large, ni trop spécifique, ou encore d’établir un canevas que l’on suit scrupuleusement. Toutefois, si elle est mal formulée ou posée au mauvais moment, la meilleure des questions peut tomber complètement à plat. À l’inverse, une simple question peut changer le cours des choses si elle est posée au bon moment.

Maintenant que les caractéristiques d’une bonne question sont connues, il faut oublier la rigidité de la technique et user de créativité; on doit notamment se laisser inspirer par la réponse de son interlocuteur à la question précédente pour formuler la suivante. Questionner efficacement, c’est l’art de faire parler. Ainsi, selon les chercheurs Eric E. Vogt, Juanita Brown et David Isaacs, une question efficace devrait :

  • susciter la curiosité;
  • encourager une conversation réflexive;
  • forcer à réfléchir;
  • dégager les hypothèses sous‐jacentes;
  • encourager la créativité et la suggestion de nouvelles possibilités;
  • être créatrice d’énergie et donner une impulsion;
  • concentrer l’attention et préciser la recherche de solutions;
  • être bien assimilée par l’interlocuteur;
  • toucher à un sens profond;
  • inspirer d’autres questions.

La question qui a un impact

En position d’accompagnement, de gestion ou de leadership, le rôle de la question est crucial et va bien au-delà de la transmission d’information ou de l’acquisition de connaissances. En effet, il s’agit d’un outil permettant de générer un impact chez son interlocuteur. En coaching, on parle des fameuses questions puissantes, celles qui agissent comme révélateur, qui ouvrent la conscience et qui génèrent habituellement un silence de réflexion chez l’autre. Or, les questions puissantes prêtes à l’emploi et universellement efficaces n’existent pas. L’impact d’une question, si intelligente soit-elle, dépend de nombreux paramètres :

  • la présence : être dans le moment présent avec son interlocuteur, empathique, prêt à l’accueillir et en mesure de laisser de côté ses propres paradigmes afin de laisser la question émerger librement;
  • l’écoute : être en position d’écoute active afin de saisir tous les messages, dits et non-dits, laisser suffisamment de place à l’autre pour répondre et prendre la peine de reformuler ses propos;
  • la relation : établir une relation de confiance mutuelle, un cadre est propice à la question;
  • le moment : savoir si l’interlocuteur est prêt à entendre la question ici et maintenant;
  • la résonance : faire en sorte que la question touche l’être tout entier de l’interlocuteur et qu’elle ne soit pas uniquement d’ordre cérébral;
  • le silence : laisser le silence faire son œuvre en sachant se taire.

Conclusion

Heureusement, la technique et l’art de la question s’acquièrent tout au long de la vie. Il ne s’agit donc pas d’une compétence innée, mais bien d’un acquis qui s’exerce et se développe. Bien qu’il s’agisse d’un art difficile à maîtriser, il est à la portée de quiconque saura faire preuve d’une grande qualité de présence à l’autre.

Article paru dans le Coin de l’Expert http://www.portailrh.org