La satisfaction au travail : un remède à l’absentéisme?

L’absentéisme coûte cher aux organisations. Au Canada, on évalue les coûts directs de l’absentéisme à 6% de la masse salariale et le nombre de jours d’absence des employés québécois est de 17% plus élevé que la moyenne canadienne. L’approche disciplinaire s’avère inefficace et il faut aujourd’hui s’attarder davantage aux causes et aux mécanismes psychologiques de l’absentéisme afin de proposer des solutions durables. Bien entendu, l’insatisfaction au travail n’explique pas toutes les formes d’absentéisme, mais demeure un corrélat sur lequel il vaut la peine de se pencher.

L’absentéisme

L’absentéisme provient d’un déséquilibre entre les besoins de l’employé et son milieu de travail. Il peut être involontaire lorsqu’il résulte d’une incapacité à être présent (maladie, deuil, etc.) ou volontaire lorsqu’il résulte d’une décision d’un employé de ne pas être présent au travail (souffler, prendre du recul, etc.). L’individu tentera d’être présent au travail dans la mesure où il pense pouvoir déployer l’effort requis pour se rendre à son travail ou s’il croit qu’il y a plus de conséquences positives que de mauvaises pour lui de se rendre au travail.

Bien entendu, les causes de l’absentéisme sont complexes et peuvent être reliées à une multitude de facteurs comme l’âge, le genre, la situation familiale, la distance entre le lieu de résidence et le milieu de travail, la santé, etc. et ne pourront jamais être entièrement sous le contrôle de l’organisation, ni même de l’individu qui s’absente. Toutefois, plus un employé se dit satisfait au travail, c’est-à-dire qu’il établit un bilan positif à être au travail, plus il sera enclin à faire l’effort nécessaire pour s’y rendre.

La satisfaction au travail

Bien que la croyance populaire suggère qu’un employé heureux est plus productif au travail, il semble que la communauté scientifique soit beaucoup plus divisée sur le sujet. En effet, les travaux d’Iaffaldano et Muchinsky concluent que la satisfaction au travail aurait peu d’effet direct sur la performance au travail. Toutefois, la satisfaction au travail aurait un lien indirect sur la performance en influençant l’absentéisme volontaire, l’intention de quitter et la tendance au retrait psychologique chez un employé.

La satisfaction au travail repose sur :

– Les caractéristiques de son travail : Étendue et portée de ses tâches, conditions d’emploi (salaire, horaire, avantages sociaux, etc.), niveau hiérarchique, taille de l’équipe, style de leadership de son supérieur immédiat, relations de travail, chances d’avancement, etc.

– L’individu lui-même : La façon dont l’individu lui-même, à cause de ses valeurs et de sa personnalité, réussit à s’intégrer à son travail et à remplir ses tâches de façon à ce qu’elles soient intéressantes pour lui. Certains employés sont d’éternels insatisfaits qui n’ont pas suffisamment confiance en eux-mêmes ou aux autres pour établir des relations satisfaisantes au travail et par rapport à leur travail.

Les organisations ont donc tout à gagner à mieux connaître leurs employés afin de comprendre leurs motivations et leurs sources de satisfaction au travail. À cet égard, le processus d’embauche s’avère très riche en informations utiles, par exemple : Quelles sont les valeurs du candidat et comment s’arriment-elles à celles de l’organisation? Quel est l’effort à fournir pour se rendre au travail (distance et temps)?, Quelle représentation se fait-il d’un bon leader? Etc. Les organisations doivent se demander en toute humilité si elles seront capables de satisfaire les attentes des candidats rencontrés avant de procéder à leur embauche même si, pour elles, il s’agit du candidat idéal.

Bien entendu, il est difficile de satisfaire tout le monde à tous les niveaux. Cependant, le fait de mieux comprendre les fondements de la satisfaction au travail chez les individus permet aux organisations de mettre en place des mesures afin de développer une relation durable entre l’organisation et l’employé. Les politiques RH, qu’elles soient curatives ou préventives, devraient donc poursuivre trois principaux objectifs: maintenir l’effort au travail par des comportements d’efficacité et de coopération, minimiser les comportements de retrait tels que les retards, l’absentéisme et les départs volontaires et finalement éviter les comportements problématiques.

Devant la diversité des éléments qui influent sur la satisfaction au travail et le fait que ces paramètres sont différents pour chaque personne, c’est la flexibilité des politiques et mesures de rétention qui permettront aux organisations de retenir et de fidéliser leurs employés.

Quelques pratiques gagnantes

La flexibilité du temps de travail apparait clairement comme une pratique gagnante à l’heure où les gens réclament un meilleur équilibre travail-vie personnelle. Les organisations d’aujourd’hui doivent favoriser les horaires variables ou adaptables autant que possible afin d’offrir le plus de liberté possible aux collaborateurs. Le télétravail, des journées de récupération après des périodes intensives ou des départs avancés de fin de semaine peuvent aussi être des moyens de favoriser cet équilibre. Bref, il a été démontré que la flexibilité d’horaire apporte plus de satisfaction au travail et contribue davantage à réduire l’absentéisme que l’octroi de journées de maladie par exemple. En effet, les entreprises qui paient des journées de maladie ont plus d’absences que celles qui n’en paient pas.

Accorder davantage d’autonomie aux équipes de travail est également une source de satisfaction au travail. Les collaborateurs aiment être impliqués dans la planification des tâches à effectuer et se sentir responsables, compétents et autonomes dans ce qu’ils font. Il faut apprendre à décentraliser les prises de décisions et à déléguer le plus possible.

Les organisations doivent également changer leurs paradigmes en gérant l’efficacité de leurs collaborateurs par le repos. Par exemple, éviter les longues périodes de travail sans congé dans le but de maintenir les équipes en forme et impliquées et surveiller l’accumulation des heures supplémentaires et réviser sur une base régulière les priorités et le besoin d’effectifs. Ainsi, il pourrait être judicieux pour une organisation d’encourager la prise de jours de vacances à tous les trois mois ou d’instaurer quelques journées payées, mais non travaillées, par année pour l’ensemble de ses collaborateurs ou par secteurs.

La rémunération à la carte est également une nouvelle tendance qui mérite d’être explorée. Elle est née d’un besoin de personnaliser les plans de rémunération en tenant compte de la diversité de la main-d’œuvre. Il s’agit ainsi de donner aux collaborateurs la possibilité de choisir les avantages qui leur conviennent le mieux au lieu d’adhérer à un plan uniforme. Par exemple, un employé pourrait désirer une semaine de vacances de plus, plutôt qu’une augmentation de salaire. Il faut d’abord assurer la base pour tous (au niveau de l’assurance collective et des vacances par exemple) puis d’ouvrir différentes options.

Les organisations qui investissent dans leur management investissent également dans la fidélisation de leur personnel et freinent l’absentéisme. L’insatisfaction des employés face à leur supérieur immédiat est un facteur qui ressort dans nombre d’études et de sondages pour expliquer l’absentéisme et la démission. Les employés se plaignent généralement du manque de confiance, de respect, de soutien et de reconnaissance de la part de leur supérieur, perçoivent de l’iniquité ou dénoncent carrément leurs faibles habiletés de gestion et de leadership.

Finalement, le développement des compétences et du talent et le cheminement de carrière sont également des axes à ne pas négliger. Les collaborateurs ont un désir de sentiment d’efficacité personnelle et de dépassement de soi qu’il faut savoir nourrir et exploiter non seulement pour servir les ambitions de l’organisation, mais aussi pour développer l’employabilité des individus.

Bref, l’époque où ce qui était bon pour l’un était aussi bon pour l’autre est maintenant révolue! L’unicité fait place à la diversité et l’égalité n’est plus synonyme d’équité. Le monde du travail est en pleine mutation et tous devront revoir des paradigmes bien enracinés. Tant les syndicats que les employeurs ont un examen de conscience à faire afin de demeurer compétitifs sur le marché. Sommes-nous prêts?

Josée Marcotte, CRHA, PCC

Présidente d’Émergence, stratège en management de talents Inc., Josée Marcotte, CRHA, PCC, est consultante en gestion des ressources humaines et coach professionnelle certifiée. Elle se spécialise en recrutement, développement des compétences et du talent, de même qu’en accompagnement auprès des PME. On peut la joindre par téléphone au 1.877.994.3855/450.994.3855 ou par courriel à [email protected]

« Article paru dans le Coin de l’Expert http://www.portailrh.org »