L’entreprise libérée : un nouveau paradigme

Dans un rapport accablant

La Commission de la santé mentale du Canada évoque qu’au Canada, les problèmes de santé psychologique et les maladies psychologiques sont la principale cause d’invalidité et coûtent à l’économie canadienne environ 51 milliards de dollars par année. De ce montant, 20 milliards de dollars sont associés à des problèmes psychologiques liés au milieu de travail. Dans cette étude, 47 % des travailleurs canadiens estiment que leur travail est l’élément le plus stressant de leur quotidien[1].

Parallèlement aux enjeux de santé mentale en milieu de travail

Les organisations font face à un phénomène de désengagement de leurs salariés, ce qui a, sans conteste, un impact significatif sur la productivité et la rentabilité des organisations. Selon le « State of the global workplace » une vaste étude menée par Gallup entre 2014 et 2016 dans quelques 155 pays, 80% des employés au Canada ne sont pas engagés ou sont activement désengagés dans leur travail.

Si le travail rend malade et ne génère pas plus de sentiment de satisfaction et d’épanouissement chez les travailleurs, c’est peut-être le travail en lui-même et le cadre dans lequel il est exercé qui rendent malade. Les entreprises tentent d’améliorer le bien-être au travail par toutes sortes de moyens : congés, gym sur place, paniers de fruits, activités sociales, télétravail, etc. Sans succès ! Se pourrait-il que l’on ne s’attaque pas à la bonne cible ? Si l’on soigne l’entreprise plutôt que les travailleurs, peut-être que ces derniers ne se rendront plus malades à cause du travail ?

C’est le pari qu’ont fait plusieurs patrons libérateurs dont Bill Gore (Gore et associés), Jean-François Zobrist (Favi), Rich Teerlink (Harley Motorcycle), et plus près de nous Steve Bussières (Produits métalliques Bussières), Jean-Rock Fournier (Lumca) pour ne nommer que ceux-là.

Au sein de ces organisations, ce sont les employés qui prennent les décisions et ceux-ci sont tout à fait libres d’organiser leur temps de travail, de se fixer des objectifs et de prendre des initiatives personnelles. L’entreprise libérée repose sur un postulat de base : soit que les humains sont dignes de confiance et que leurs compétences et talents ne peuvent véritablement s’exprimer que dans un contexte de grande liberté.

Ainsi, la pyramide hiérarchique traditionnelle est remplacée par une structure où les collaborateurs s’autodisciplinent. Ce type d’environnement est très attrayant pour les nouvelles générations qui recherchent le bien-être au travail, mais qui désirent également que leur emploi convienne à leur style de vie et non l’inverse.

L’autonomie et le partage de l’autorité ne signifient pas pour autant l’anarchie. En effet, des règles collectivement définies garantissent l’espace de liberté de chacun. L’holacratie en est d’ailleurs un bon exemple. Ce système de management permet de transférer des fonctions traditionnellement du ressort de la direction dans des processus exécutés à travers toute l’organisation et auxquels participent tous les employés.

Conclusion

Toutefois, avant de se lancer dans un changement d’une telle envergure, il faut y croire et l’amorcer pour les bonnes raisons. Bien que ce type d’organisation génère des employés plus engagés, des équipes plus agiles, une organisation plus innovante et bien souvent une amélioration de la performance globale, ce n’est pas la quête de cette performance qui est à l’origine de la réflexion des patrons qui ont décidé de suivre cette voie. C’est plutôt leur foi inébranlable au potentiel de l’être humain et leur désir sincère de placer celui-ci au cœur des organisations. Le chemin de la libération est long et ardu, et malgré cela, un seul constat : toutes les personnes qui vivent en entreprise libérée à qui nous avons parlé ne reviendraient pas en arrière.

[1] Commission de la santé mentale du Canada. (2016). Norme nationale. Extrait de

http://www.mentalhealthcommission.ca/Francais/norme-nationale